Comment décider de sa propre rémunération de dirigeant ? C’est une question que tout chef d’entreprise est, un jour, amené à se poser. Mais au-delà de ses besoins ou de ses souhaits, il faut prendre en compte la capacité financière de l’entreprise pour le calcul de la rémunération du dirigeant. David LADAME, expert-comptable et fondateur de la communauté Behappy, nous en dit plus sur la rémunération du dirigeant d’entreprise.
Rémunération minimum du dirigeant
Bonjour David, et merci de participer à cette interview. Entrons dans le vif du sujet : d’abord, pourquoi se rémunérer en tant que chef d’entreprise ?
Parce que tout travail mérite salaire ! (Rires)
Trop souvent, nos clients entrepreneurs envisagent, à tort, de ne pas se rémunérer au début, afin de réaliser des économies. Notamment, lorsqu’ils bénéficient de dispositifs d’aides, tels que l’ACRE. Mais c’est un choix dangereux, car il fausse la rentabilité de l’entreprise.
C’est pourquoi, je conseille d’intégrer une rémunération minimum du dirigeant (« le minimum vital ») dans la feuille de route de l’entreprise et dans le prévisionnel.
Et quel est le bon moment pour commencer à se rémunérer ?
Je recommande à l’entrepreneur de se rémunérer dès le début, car cela lui permet de se motiver, et d’avoir un projet viable économiquement.
À savoir que le dirigeant est aussi la « soupape » de l’entreprise. Si elle va mal, il baissera sa rémunération pour garantir sa pérennité.
Salaires ou dividendes ?
Est-il préférable de se verser des salaires ou des dividendes ?
Ah, le fameux arbitrage entre dividendes et rémunération ! Il faut distinguer :
- la rémunération du dirigeant, qui rémunère un travail, c’est un revenu régulier ouvrant droit à différentes prestations (maladie, maternité, etc.) ;
- et les dividendes, ce revenu exceptionnel qui rémunère un droit de propriété, et qui exclue ces prestations sociales.
Leur fiscalité est différente : en France, le salaire est plus fortement taxé que les dividendes.
Mais salaire et dividende avec une optimisation, sont tout à fait conciliables. On prévoit d’abord de rémunérer décemment le dirigeant pour son travail d’exploitant, avec une vraie protection sociale et retraite. Et quand l’entreprise fonctionnera bien, viendra le moment de prendre des dividendes (en fonction des excédents et de la trésorerie).
Calcul de la rémunération du dirigeant
Concrètement, quels sont les éléments à prendre en compte pour décider du montant à se verser ?
D’abord, le statut du dirigeant :
- le président de SAS/SASU assimilé salarié, doit établir un salaire mensuel ;
- si le gérant a un statut de travailleur non salarié (TNS), sa rémunération est fixée annuellement.
Ensuite, il faut vérifier l’adéquation entre le besoin vital du dirigeant et la capacité contributive de l’entreprise (le « cash »).
On va aussi ajuster la rémunération du dirigeant d’entreprise avec des primes exceptionnelles, ou le versement de dividendes, etc (c’est la variable d’ajustement).
Enfin, on va comparer sa rémunération par rapport au secteur d’activité de l’entreprise.
Rémunération du dirigeant et charges sociales
Quelles sont les charges sociales applicables à la rémunération ?
Là encore, il faut distinguer selon le statut du dirigeant :
- la rémunération du dirigeant de SAS/SASU supporte les mêmes charges sociales qu’un salarié (mais il ne bénéficie pas de la protection chômage) ;
- le TNS payera des cotisations sociales pour le même type de prestations (à l’exclusion du chômage). Mais, contrairement à la rémunération du dirigeant de SAS, celle du TNS ne supporte pas de cotisations patronales. Cela revient donc moins cher pour l’entreprise.
En termes de protection sociale, le président de SAS assimilé salarié est mieux couvert, car ses prestations relèvent du régime général. Mais le TNS peut compléter ces carences sociales grâce aux contrats Madelin.
Rémunération du dirigeant : fiscalité et démarches
Quelle est l’imposition de la rémunération des dirigeants ?
La rémunération des dirigeants s’intègre dans le foyer fiscal personnel, dans la catégorie des traitements et salaires. Les dividendes sont intégrés dans les revenus mobiliers.
Quelles sont les démarches à effectuer lorsqu’on prend une rémunération ?
Au moment de l’assemblée générale, les associés (ou l’associé unique) déterminent la rémunération annuelle du gérant TNS pour l’exercice suivant.
En revanche, il faut établir mensuellement une fiche de paie au président de SAS, et une déclaration des cotisations sociales.
À noter que le dirigeant peut percevoir une rémunération dans le cadre de son mandat, mais également pour une fonction technique dans le cadre d’un contrat de travail (exemple : directeur commercial). Ainsi, s’il vend son entreprise, il ne sera plus mandataire social, mais pourra conserver ses fonctions de directeur commercial dans l’entreprise.
Rôle de l’expert-comptable en matière de rémunération du dirigeant d’entreprise
En tant qu’expert-comptable, en quoi avez-vous un rôle clé à jouer en matière de rémunération du dirigeant d’entreprise ?
D’abord, nous assurer de la bonne adéquation entre les souhaits du dirigeant et la réalité opérationnelle, pour prévoir une rémunération de son travail qui soit juste. On va lui donner des indicateurs de la performance à atteindre pour se rémunérer. Et notre rôle de vigie consistera à veiller à ce que le dirigeant ne travaille pas pour rien.
Ensuite, on va se poser comme conseiller du dirigeant, avec une critique toujours objective. Il s’agira de vérifier que son choix de rémunération est cohérent avec la capacité contributive de l’entreprise, pour sa pérennité. On dispose des chiffres, de l’expérience du passé, on a donc la capacité de remettre le dirigeant sur les rails.
On intervient aussi en matière d’optimisation fiscale et sociale de sa rémunération.
Bref, l’expert-comptable a un rôle majeur à jouer, basé sur son expérience terrain.
Merci David pour ces précieux conseils et informations !